Choucroute Crew

Mission secrète au lac des Truites...

-Agent Maupertuis, au rapport!

-Chef! Oui, chef!

-Nous vous avions confié une mission de premier ordre ce dimanche. Nous vous écoutons.

-Bien, chef! J'ai quitté mon domicile à 5h45 du matin. Le ciel était dégagé dans la plaine, mais couvert dans les Vosges.

-A quelle heure êtes-vous arrivé au point 1?

-7 heures précises, chef, conformément au plan de route. Un rapide balayage thermique du col a confirmé ce que je voyais:le parking était désert. J'ai pu me préparer sereinement. La météo était radicalement différente. Un fort vent de nord secouait les arbres, et la température était de -8°.

-Continuez. Les ordres que nous vous avions donné insistaient bien sur l'extrème confidentialité de votre mission. Cela a-t-il compliqué votre progression?

-Pas le moins du monde. A 7h25, je me suis extrait du véhicule, j'ai chaussé les skis, et je me suis mis en route vers les prochains sous-bois. La nuit rendait le camouflage aisé.

-Vous sentiez-vous menacé?

-Je n'ai jamais cessé de surveiller mes arrières. Toutefois, arrivé au-dessus de 1200 mètres, le brouillard était si dense que j'ai pu me concentrer sur mon chemin sans craindre d'être observé.

-La crête?

-Oui, jusqu'au Gazon du Faing, ma visibilité naturelle oscillait entre 2 mètres et 20 mètres. Sans les lunettes infra-rouge, j'aurais mis deux fois plus de temps à atteindre le point 2.

-Rappelez-nous, ce point 2...

-Le Gazon du Faing est un sommet qui domine l'objectif. Je devais dans un premier temps m'assurer qu'il n'était pas gardé. Puis je devais enlever les peaux et descendre vers l'objectif, à savoir le refuge du lac des Truites. Aucun incident à déclarer. Les environs étaient déserts, et j'ai eu le chalet en ligne de mire à 9h25.

-Bien.

-Les volets du refuge étaient fermés. Personne sur le pas de la porte. J'ai pu m'approcher jusqu'aux fenêtres. Le blizzard m'empêchait de distinguer le moindre son, c'est pourquoi j'ai sorti de son étui le stétoscope bi-magnétique, que j'ai appliqué contre le volet. Un bruit difus émanait de l'intérieur. J'avoue que sans les acquis du stage de perfectionnement acoustique, je n'aurais probablement pas réussi à identifier ces sons.

J'ai d'abord distingué deux grognements. Le premier m'était familier: c'était celui de monsieur Sarkozy. Le deuxième était une sorte de caquètement étouffé qui m'a laissé un moment perplexe. Pourtant, il n'y a plus de doute dans mon esprit. Il est évident que notre Président de la République éprouve un certain plaisir à la fréquentation des pintades.

-Avez-vous réalisé un enregistrement?

-Affirmatif. J'ai remis la bande au service, qui l'a aussitôt faite transmettre à monsieur de Villepin.

-Vous comprenez ce qui a motivé cette mission...

-J'aime mon pays, chef, et je ne saurais tolérer que son président...

-Abrégeons! Comment vous êtes-vous exfiltré?

-Je suis remonté dans la combe sud, pour ne pas repasser à proximité de mes traces. La pente était plus raide, et j'ai eu quelque mal à arriver jusqu'en haut. L'une de mes fixations a cédé à proximité du Gazon de Faîte. J'ai dû finir avec les skis sur l'épaule. Ce contre-temps m'a contraint à bivouaquer dans un trou de neige, dos à un rocher. La tempête était assez incroyable à cet endroit, et je devais parfois m'arrêter d'avancer pour résister aux assauts du vent.

A 12h45, j'ai rejoint mon véhicule. La foule des skieurs du dimanche m'a offert un camouflage adéquat, et j'ai pu regagner mon domicile sans ennui.

-Merci, sergent. Lorsque les événements se seront déroulés, le nouveau chef d'Etat pensera à vous. L'armée est avec nous, ça devrait aller vite. En attendant, vous êtes officiellement en congé. Rentrez chez vous.

-A vos ordres!